J’ai failli tester pour vous l’ascenseur à bateau

Loriane Rommeveaux J'ai testé Leave a Comment

Gabarit et Wallonie

Comme les amateurs de transport ferroviaire se rendent à Garabit pour admirer le viaduc d’Eiffel, les férus de transport fluvial ont aussi leur lieu de pèlerinage : la Wallonie, et plus précisément une zone d’environ 16 km² à l’Est de la Louvière traversée par bras parallèles du Canal du Centre distants d’un kilomètre. Ce canal permet de relier le canal Charleroi-Bruxelles avec le canal Nimy-Blaton-Péronnes. La densité d’infrastructures de la zone y vaut le détour : deux écluses, un chantier de conteneurs, une cimenterie, un pont canal, deux ponts levis, trois ponts tournant, deux portes de garde, quatre ascenseurs à bateaux de la fin du 19ème siècle classés au patrimoine de l’UNESCCO et surtout, un gigantesque ascenseur funiculaire pour franchir 73m de dénivelé – le tout dans un cadre bucolique et verdoyant.

 

©Interface Transport

Pour comprendre cette situation, il faut remonter en 1957, année de signature d’un accord européen qui prévoit la standardisation des péniches à 1 350 tonnes. Les canaux belges étaient jusqu’alors uniquement au gabarit Freycinet (du nom de l’inventeur de la norme d’écluse à laquelle les voies d’eau se sont adaptées), seuls les bateaux entre 300 et 350T pouvaient y passer. Ce réseau de « petites lignes » existe encore de nos jours, y compris en France – il est d’ailleurs en proie à des problèmes d’infrastructures comme peuvent l’être les petites lignes ferroviaires. En 1957, afin de favoriser les échanges au sein de la nouvelle communauté européenne du charbon et de l’acier, la Belgique lance un grand programme d’élargissement des canaux. L’objectif est de permettre les connexions avec ses voisins européens par des bateaux de grand gabarit de 1 350 tonnes.

 

Seule ombre au tableau : sur le Canal du Centre, les 4 ascenseurs hydrauliques ne peuvent pas supporter plus de 350 tonnes. La proximité de la voie d’eau avec les habitations rend l’élargissement d’autant plus problématique… Il faut donc créer un nouveau canal au grand gabarit, long de 24 km avec trois ouvrages d’art :

  • L’ascenseur funiculaire de Strépy-Thieu
  • Le pont canal du Sart à Houdeng-Aimeries
  • La porte de garde du Blanc-Pain.

Deux salles, deux ambiances : d’un côté, le nouveau canal, avec l’ascenseur funiculaire, le pont canal du Sart et la porte de garde monumentale. De l’autre, le canal historique, avec ses ponts tournants, ses ponts levis et ses ascenseurs hydrauliques.

 

 

©Interface Transport

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Un ascenseur funiculaire de 73m de haut

Inauguré en 2002, l’ascenseur funiculaire était en construction depuis 1982. Ce choix technique a été fait au regard du dénivelé à franchir, une écluse aurait été très fortement consommatrice d’eau. L’installation permet également de garantir la navigation même en cas de maintenance ou de panne grâce à ses deux bacs parfaitement indépendants. Une quinzaine de bateaux passent par l’ascenseur de Strepy-Thieu chaque jour. L’histoire raconte d’ailleurs que deux membres de l’équipe d’Interface Transport ont fait – en vain – du bateau-stop pour embarquer dans une péniche en attente…

L’ouverture de l’ouvrage a permis une forte hausse du trafic fluvial sur le Canal du Centre, notamment dans les dix premières années (+ 117 % de tonnages transportés entre 2003 et 2013). Depuis 2014, les tonnages sont relativement stables.

 

©Interface Transport

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Le pont canal du Sart et la porte de garde du Blanc-Pain

La prouesse technique ne s’arrête pas en haut de l’ascenseur : celui-ci est prolongé par un pont-canal qui permet de franchir une vallée urbanisée. A 20 m du sol, ce pont contient 80 000 tonnes d’eau supportées par 28 piliers sur 500 mètres de long. Enfin, dernier élément de ce passage à grand gabarit, la porte de garde du Blanc Pain permet de fermer le canal en cas de problème et d’éviter ainsi l’inondation de la vallée.

 

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Cette balade en Wallonie entre petit et grand gabarit permet donc de découvrir les évolutions techniques en matière d’infrastructures fluviales, mais aussi de prendre conscience de l’impact de ces constructions sur le paysage et le fonctionnement des territoires où elles sont implantées. Et pour le bateau-stop, on reviendra !

 

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